Journée très sympa à Wesserling avec le Collectif "Art des possibles"

Publié par Annick KIEFER

Journée très sympa à Wesserling avec le Collectif  "Art des possibles"

En acceptant l'invitation d'Arlette Hasselbach,  présidente de l'AFMD, "Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation", à venir présenter "A la frontière", je ne savais pas au juste ce qui m'attendait. Jack et moi avons découvert un endroit chaleureux où s'activaient des jeunes gens, garçons et filles tous plus charmants et accueillants les uns que les autres, sous une pluie obstinée les obligeant à rapatrier les installations extérieures prévues pour accueillir les visiteurs du jour.

Un îlot de verdure au bord de la Thur sur le site du Parc de Wesserling où des espaces conviviaux sont aménagés de bric et de broc, devant le bâtiment de "La Vitrine" où se trouvent les ateliers des artistes et des espaces communs, comme la cuisine où on nous a servi une délicieuse soupe. Les chiens, les enfants hauts comme trois pommes, les quinquas, les artistes en résidence comme les bénévoles, tout ce petit monde cohabite en bonne intelligence, dans un esprit de tolérance et de partage.

Les créations, quelles soient picturales, théâtrales, sonores, ne sont pas élitistes mais accessibles à tous, dans un soucis de vulgarisation des arts et de la culture, notamment auprès des enfants. Les propositions de spectacles sont très ludiques, variées, et inter-générationnelles, comme le loto-rigolo auquel nous avons participé. Bonne humeur et convivialité assurés!

En résumé, je vous garantis d'excellents moments dans ce havre de paix hors du temps et de l'époque, éloigné du consumérisme et des fausses urgences, où on a l'impression de faire partie de la famille des hommes.

Journée très sympa à Wesserling avec le Collectif  "Art des possibles"

Arlette Hasselbach, présidente de l'AFMD, "Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation", a eu la gentillesse de nous inviter à une rencontre avec Raymond Welker, un Malgré-Nous de 91 ans, qui témoigne régulièrement dans les écoles, de son passé en tant qu'enrôlé de force dans la Wehrmacht.

Raymond n'a pas l'âge de ses guerres. Le cheveux dru et la barbichette en pointe, le corps svelte, il porte sa sacoche comme un étudiant. A l'intérieur, il y a sa vie résumée en une trentaine de pages rédigées pour ses proches, mais dont quelques exemplaires sont disponibles dans les médiathèques de Thann, Wesserling et Mulhouse. La pudeur s'est défait des détails, a gommé les drames, le sang et les larmes, car sa vie contrainte par la Grande Histoire déborde largement  ces pages.

Raymond sait chaque souvenir, hésite entre l'alsacien et le français, cherche ses mots pour décrire au mieux les maux, pour ne pas trahir la vérité, rendre à Hitler ce qui lui appartient, coller aux dates, aux noms, pour que la mémoire ne déforme pas la réalité, pour que le temps passé n'efface rien, ne rajoute rien. Raymond n'en veut pas à la vie ni aux hommes. Il n'empire pas, n'allège pas. Il colle à cette époque dans un souci de  justice et d'équité et témoigne pour que la nôtre échappe aux  divisions qui mènent inévitablement aux conflits.

Parfois, les larmes lui viennent, quand il évoque son retour en mai 1945, auprès des siens. Quand il se rappelle cet enfant qui lui a un jour demandé s'il avait tué quelqu'un. Tué quelqu'un! Lui n'était pas en première ligne sur le front car il était assigné aux tirs de mortiers, dont la position était plus en retrait. Il n'était pas en première ligne face à la mort, ne croisait pas son rictus effrayant sur le visage de l'adversaire. Il ignorait où elle tombait, la mort d'acier qu'il envoyait à l'aveugle, qui  explosait  par ses mains, ses gestes presque automatiques, parfois dans la terre profonde et désolée, parfois sur les hommes, des hommes comme lui, soldats avant d'être français, allemands, russes, avant d'être Lorrains ou alsaciens.

Les larmes brouillent le regard de Raymond. Il pense que oui, sans doute, il a tué!

Et ce doute ou cette évidence, ces deux faces d'une même pièce tragique, se disputent en lui chaque jour. Voilà pourquoi il témoigne, au prix de voir régulièrement ses propres blessures ravivées. Mais il sait, Raymond, que parler la mort dans l'âme permet à la vie de gagner. Après son devoir de soldat, français enrôlé de force dans l'armée allemande, Raymond se voue au devoir de Mémoire, et cela, par sa propre volonté.

Merci pour ce partage émouvant et nécessaire.

http://afmd.asso.fr/-Delegation-Territoriale-Haut-Rhin-372-.html

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